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Biodiversité, faune & conservation
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26 mai 2015

Gibbon de Hainan : nouveau plan d’actions pour sauver l’un des plus rares primates au monde

Avec une population totale estimée à 23-25 individus, le gibbon de Hainan (Nomascus hainanus) est aujourd’hui l’un des primates les plus menacés au monde. Pourtant, dans les années 1950, quelque 2.000 spécimens vivaient dans douze comtés au cœur des forêts tropicales de cette île située au sud de la Chine. Depuis, la fragmentation et la perte de leur habitat - associés à la chasse pour la médecine traditionnelle - ont conduit les gibbons au bord du gouffre. Selon un rapport de Greenpeace dévoilé en 2011, 22 % de la surface forestière a disparu sur Hainan entre 2001 et 2010. Et les plantations d’hévéas pour la récolte du latex ont remplacé les forêts d’eucalyptus prisées par les gibbons dont les ultimes représentants survivent désormais dans la réserve naturelle nationale de Bawangling, au centre-ouest de l’île.

Au début des années 1980, lors des premières études sur le terrain, le nombre de gibbons était estimé à 30 ou 40 spécimens dont sept seulement à Bawangling. Des populations isolées ont été repérées au cours des années 1980 dans d’autres zones forestières où elles ont sans doute survécu jusqu’à plus récemment. Néanmoins, les prospections entreprises depuis 2003 n’ont pas permis de localiser le moindre individu en dehors de la réserve de Bawangling.

FEMELLE GIBBON DE HAINAN ET SON PETIT

Femelle gibbon de Hainan avec son petit (avec l’aimable autorisation de l’auteur. Copyright Jessica Bryant).

Espèce cible

Regroupant près de 80 organisations non gouvernementales œuvrant pour la sauvegarde de la biodiversité, l’alliance pour zéro extinction (AZE) considère le primate endémique à Hainan comme une espèce cible. Malgré les initiatives lancées après un premier séminaire organisé en 2003, l’avenir du gibbon de Hainan reste très incertain à cause de son unique et petite population. La moindre épizootie, une recrudescence du braconnage, un ouragan ou une fluctuation temporaire du sex-ratio auraient des conséquences dramatiques pour l’espèce. La consanguinité et la perte de diversité génétique constituent également un danger majeur pour le gibbon de Hainan, susceptible d’être entraîné dans un phénomène baptisé spirale d'extinction.

Soucieuse de mettre en place des mesures de protection plus efficaces, la Société zoologique de Londres (ZSL), en collaboration avec les autorités de la réserve de Bawangling et le groupe chinois des spécialistes des primates de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), a donc organisé un second séminaire, du 18 au 20 mai 2014, dont la rapport final a été publié mardi 19 mai 2015. Les travaux ont notamment identifié cinq objectifs clés :

° protéger plus efficacement l’habitat des gibbons et accroître leur territoire grâce à des corridors dans la réserve.

°  parvenir à augmenter la population de gibbons.

° suivre en permanence les animaux et mieux connaître les facteurs intervenant dans la dispersion des individus, la formation de nouveaux groupes et la colonisation de nouveaux habitats.

°  créer un plan de secours en cas de situation de crise.

° améliorer la communication entre tous les acteurs de la sauvegarde de ce gibbon.

Passerelles artificielles
Au total, 12 champs d’intervention et 44 actions spécifiques ont été recensés avec divers degrés de priorité. Parmi elles figurent le développement de nouveaux habitats exempts de perturbations humaines, la pratique de l’agroforesterie, le déplacement d’individus pour former de nouvelles familles, l’implication des communautés locales ou encore la création de ponts artificiels dans la canopée reliant diverses portions de forêt. Dès cette année, plusieurs passerelles seront ainsi construites à la cime des arbres. Des défenseurs de l’environnement diffuseront également des enregistrements de chants de gibbons afin d’inciter les individus solitaires à rejoindre des secteurs non fréquentés par les singes, avec l’espoir d’assister à la formation de nouveaux groupes.

FORET TROPOCALE AU SUD DE HAINAN

Paysage de forêt tropicale au sud de l’île, dans un territoire actuellement inoccupé par les gibbons (photo Anna Frodesiak).

Croissance zéro

Actuellement, la population de gibbons de Hainan se limite à trois groupes sociaux (A, B et C) comptant uniquement cinq femelles en âge de se reproduire et une poignée d’individus solitaires, quatre au maximum. En outre, si la réserve de Bawangling s’étend sur deux comtés et environ 300 km2, les singes occupent un territoire restreint et très fragmenté de 15 km2, situé à une altitude relativement élevée au centre de la zone protégée. En dépit des mesures adoptées depuis 2003 et d’un taux de natalité apparemment normal, l’espèce ne présente pas une croissance démographique constante. Malgré la formation d’un troisième groupe social en 2011, les gibbons adultes échouent à former de nouveaux groupes après avoir quitté leur famille. Selon des recensements viables, la population globale a oscillé durant une trentaine d’années entre 15 et 25 individus, ne parvenant jamais à franchir ce dernier seuil. Cette apparente absence de croissance demeure non élucidée. Les scientifiques se demandent si les fluctuations constatées reflètent l’état réel de la population ou sont liées aux méthodes d’évaluation, voire à l’expérience des chercheurs.

Une classification longtemps incertaine

La taxonomie du gibbon de Hainan a, elle aussi, longtemps suscité le débat. La protection de ce primate a certainement souffert de cette confusion. Durant la majeure partie du siècle dernier, le gibbon de Hainan a été considéré comme un gibbon noir (Nomascus concolor), même si de nombreux auteurs estimaient qu’il s’agissait d’une sous-espèce insulaire. Plus récemment, il fut aussi assimilé au gibbon de Cao-Vit (Nomascus nasutus), endémique du Vietnam et appartenant à la liste des 25 primates les plus menacés au monde publiée en 2014. Curieusement, le gibbon de Hainan n’y figure d’ailleurs pas. La génétique a mis fin à la controverse et a permis au gibbon d’Hainan d’accéder au rang d’espèce à part entière. Elle a même révélé qu’il représentait une lignée assez ancienne dans la famille des Hylobatidae, ayant divergé des autres espèces de gibbons voici plus de trois millions d’années.

« L’assurance d’un avenir pour le gibbon de Hainan est l’une des priorités dans la conservation des mammifères », estime le Dr. Samuel Turvey, chercheur à la Société zoologique de Londres et co-président du séminaire de 2014. « Si des mesures adéquates sont prises maintenant, il n’est pas trop tard pour le sauver. J’espère que le gibbon de Hainan deviendra l’exemple d’une success story de la conservation. »

Pour consulter le rapport final du séminaire de 2014 : www.zsl.org/sites/default/files/media/2015-05/Hainan_Gibbon_Workshop_Report_FINAL_DRAFT_compressed.pdf

Sources : International Conservation Planning Workshop for the Hainan Gibbon - Final Report, Bo’ao, Hainan, China, 18 –20 March 2014, Société zoologique de Londres, The Guardian.

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