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Biodiversité, faune & conservation
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13 novembre 2014

Un virus canin menace les derniers tigres sauvages

Outre la perte et la fragmentation de leur habitat, le braconnage et la raréfaction de leurs proies, les tigres doivent affronter une nouvelle menace baptisée canine distemper virus (CDV).

Selon une étude réalisée sous l’égide de la Wildlife Conservation Society (WCS) et publiée fin octobre 2014 dans la revue PLoS ONE, ce virus – à l’origine de la maladie de Carré chez le chien domestique – pourrait précipiter l’extinction des derniers tigres sauvages.

« Voici 30 ou 40 ans, il affectait seulement les chiens », relevait déjà en juin 2013 le docteur John Lewis, directeur de Wildlife Vets International. « Puis il a évolué et a touché notamment les mammifères marins et les grands félins. » En 1994, il a ainsi entraîné la mort de près d’un millier de lions au Serengeti, soit 30% de la population léonine du parc national tanzanien. « Les félins avaient été contaminés par les chiens de villages de la région. »

LION DANS LE SERENGETI

Lion et sa proie dans le parc national  du Serengeti, au nord de la Tanzanie (photo amanderson2).

Des conséquences mal évaluées

Ce virus peut entraîner une mortalité très importante chez certaines espèces. Il est notamment impliqué dans le déclin des populations de chiens sauvages d’Afrique (Lycaon pictus), des renards gris de l’île Santa Catalina en Californie (Urocyon littoralis catalinae) ou encore des putois à pieds noirs (Mustela nigripes). Des foyers infectieux ont également été observés chez des félins solitaires et ayant moins de contacts intraspécifiques que les lions comme le lynx ibérique (Lynx pardinus), le lynx du Canada (L. canadensis) et le lynx roux (L. rufus).

Néanmoins, de nombreuses incertitudes demeurent sur l’impact à long terme du virus. La population de lions du Serengeti a récupéré rapidement après l’hécatombe de 1994. Et des épizooties périodiques de CDV auraient peu d’influence sur les populations de loups d’Éthiopie (Canis simensis). En revanche, le virus constituerait une menace majeure pour l’avenir des derniers lycaons.

LYCAONS

Le CDV cause des ravages dans les populations de lycaons ou chiens sauvages d’Afrique dont les effectifs sont estimés à moins de 7.000 spécimens aujourd’hui contre plus de 100.000 individus au début du siècle dernier (photo Evan Summerson).

L’an dernier, l’association Wildlife Vets International estimait qu’il affectait certains tigres de Sumatra. Le CDV est également suspecté d’avoir provoqué la mort de tigres en 2003 et 2010 en Sibérie et plus récemment en Inde. Par ailleurs, 16 des 22 tigres d’un établissement zoologique du Texas ont été infectés par le virus en 2013. Sept d’entre eux sont morts ou été euthanasiés.

Modèle informatique

Pour autant, aucune recherche n’avait étudié les effets à long terme du canine distemper virus sur les populations de tigres vivant dans la nature. « Nous savions que des tigres étaient morts dans la nature à cause du CDV, nous avons donc voulu évaluer le risque encouru par des populations entières », explique Martin Gilbert, vétérinaire à la WCS.

Son équipe a choisi d’évaluer l’impact du virus sur les tigres sibériens (Panthera tigres altaica) de la réserve naturelle de Sikhote-Aline, créée en 1935 dans une chaîne montagneuse russe au nord-est de Vladivostok. Entre 2007 et 2012, le nombre de tigres y a chuté de 38 à 9 individus sans doute à cause du CDV.

TIGRE DE SIBERIE AU ZOO D'AMNEVILLE

Le tigre de Sibérie est classé en danger par l’Union internationale pour la conservation de la nature. Ici, un individu de cette sous-espèce en août 2014 au zoo d’Amnéville, en Moselle (photo Ph. Aquilon).

Les chercheurs ont eu recours à la modélisation informatique pour simuler les effets de l'infection sur des populations de tigres isolées et de différentes tailles. Ils ont également pris en compte les divers modes de transmission du virus, intraspécifique ou inhérente à la prédation de chiens domestiques et de carnivores sauvages infectés comme les renards, les ratons laveurs ou les blaireaux. Les scientifiques ont établi des scénarios avec des risques faible ou élevé en fonction de la prévalence de l’infection et des contacts des tigres avec des sources potentielles de contamination.

Identifier les espèces « réservoirs »

Selon l’une de principales conclusions de cette étude, les petites populations de tigres sont particulièrement sujettes à la menace d’une extinction liée au CDV. Sur une durée de 50 ans, le risque de disparition d’un noyau de 25 individus augmente de 65% si les félins sont exposés au virus. En demi-siècle, le CDV accroîtrait ainsi de 55,8 % le danger de disparition des tigres de Sikhote-Aline par rapport à une population de taille similaire mais non infectée.

Des résultats très inquiétants : dans les zones où ces grands félins survivent à l’état sauvage, les populations comptent souvent de moins de 25 adultes reproducteurs !

Pour Dale Miquelle , directeur du programme Russie de la WCS, « les populations de tigres sont de plus en plus réduites et fragmentées, d’où une vulnérabilité accrue à des maladies comme le CDV. Même si le braconnage et la destruction de l'habitat restent nos priorités, nous devons être prêts à affronter l’émergence de telles maladies ».

TIGRE DE L'AMOUR AU HIGHLAND WILDLIFE PARK

Tigre de Sibérie au Highland Wildlife Park, en Écosse, en décembre 2008 (photo Sylvia Duckworth).

Pour les chercheurs, la priorité consiste aujourd’hui à identifier les espèces domestiques et sauvages servant de « réservoirs » au virus et sources les plus probables d’infection des tigres. Ces derniers sont en effet trop rares pour entretenir longtemps le virus: celui-ci ne peut subsister que grâce à des carnivores suffisamment nombreux. Mieux cerner les espèces réservoirs  constituera une première étape cruciale afin d’identifier les mesures susceptibles de prévenir ou de contrôler de futures épizooties.
En outre, les petits groupes de tigres s’avérant plus exposés, les stratégies de conservation devront aussi porter sur la création de corridors écologiques entre les diverses populations parsemées dans le milieu sauvage.

Sources : PLoS ONE, ScienceDaily, BBC.

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